La téléconsultation est une ubérisation de la santé

Je devais intervenir aujourd’hui sur l’article 28 du projet de loi sur la Sécurité sociale qui traite des consultations médicales à distance. Le couperet du 49.3 fait que je ne pourrai prendre la parole dans l’hémicycle. Des dizaines d’autres députés sont logés à la même enseigne sur de nombreux sujets.

Voici le texte de cette intervention que le ministre de la Santé n’aura pu entendre et auquel, grâce à Élisabeth Borne, il n’aura pas besoin de répondre.

« Cet article 28 a un objet, j’y reviendrai, mais il est également un rappel, celui de l’échec de votre politique de santé et de celles de vos prédécesseurs depuis au moins vingt ans.

Depuis au moins vingt ans, les statistiques montraient qu’à l’horizon des années 20, la France allait manquer de médecins. Cette absence d’anticipation a créé des déserts médicaux. Pourquoi ? Nous le saurons peut-être un jour, celui où le service public aura presque disparu et que la santé sera aux mains du privé, et donc de l’argent et donc de sociétés multinationales.

Cet utile rappel étant fait, que penser du texte ?

Un article qui vise à donner un cadre à une pratique peut sembler a priori positif. Cependant, qui dit réglementation, dit peut-être pérennisation. Et c’est précisément cette hypothèse très vraisemblable qui nous inquiète.

La téléconsultation, avec ou sans cadre, avec ou sans loi, est et restera toujours une ubérisation de la médecine, c’est-à-dire une médecine déshumanisée et donc dégradée.

La téléconsultation ne devrait être qu’un stade transitoire avant un retour à la normale, c’est-à-dire à une médecine humaine où le médecin touche et ressent le malade. Or, rien dans votre politique générale ne permet de croire à un stade temporaire. Rien ne garantit que cette règlementation ne fera pas d’une exception passagèrement acceptable une pratique commune et durable. Et ce d’autant que le cadre que vous proposez reste insuffisamment protecteur.

Le « faute de mieux » que dit cet article risque de devenir à court terme « un mieux que rien ». Nous ne voterons donc pas cet article, à la fois pour ce qu’il rappelle comme pour ce qu’il semble annoncer».